Exonération en faveur des transmissions de biens ruraux : nouveautés estivales

Eclairage du 24 novembre 2023 - N°489

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En 14 Questions/réponses

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La loi de finances pour 2023 a renforcé les exonérations de droits de donation et succession en faveur de certains biens ruraux (CGI, art. 793, 2, 3°) et parts de groupements fonciers agricoles (GFA ; CGI, art. 793, 1, 4°). Moyennant une durée supplémentaire de conservation des biens transmis de 5 ans, soit une durée totale de conservation de 10 ans, la limite au-delà de laquelle le taux de l’exonération est ramené de 75 à 50 %, est  portée de 300 000 € à 500 000 €.

Une actualisation estivale du Bofip précise les modalités d’application de ce nouveau dispositif. Elle recèle nombre d’indications utiles et parfois innovantes, notamment en ce qui concerne les effets atténués de la déchéance du régime de faveur lorsque le bien est cédé en rupture de l’obligation décennale de conservation mais a été conservé par le bénéficiaire pendant au moins 5 ans.

Question n°1 : Les commentaires administratifs faisant suite à la réforme réalisée par la loi de finances pour 2023 étaient-ils attendus ?

Réponse : Oui.

La réforme des régimes d’exonération en faveur des transmissions de certains biens ruraux réalisée par la loi de finances pour 2023 n’était pas prévue par le projet de loi de finances déposé par le Gouvernement. Elle a été insérée par voie d’amendement (Amendement n° I-3572 déposé à l’Assemblée Nationale le 14 octobre 2022). Cette donnée explique certainement la rédaction maladroite et, à certains égards, dissonante retenue. Les hiatus induits engendrent nombre d’interrogations concernant la mise en œuvre du nouveau dispositif, particulièrement lorsque la transmission intervient au profit de plusieurs bénéficiaires ou fait suite à des mutations antérieures ayant déjà bénéficié du régime de faveur (V. sur cette question  F. FRULEUX, Renforcement des exonérations en faveur de certains biens ruraux : constat et recommandations, JCP N n° 3, 20 janv. 2023, 1013).

Question n°2 : L’actualisation opérée par l’administration fiscale est-elle importante en termes de volume ?

Réponse : Oui.

Ce sont au total trois subdivisions du BOFiP-Impôts, ce qui représente quelque 45 pages qui sont affectées par cette actualisation. Ces sections s sont consacrées respectivement au régime d’exonération concernant les biens ruraux loués par bail à long terme  (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20); aux transmissions de parts de groupements fonciers agricoles (GFA) (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-30) et à ce que l’administration fiscale qualifie de « rapport fiscal »  (BOI-ENR-DMTG-10-50-50) mais qu’il est préférable de qualifier de « rappel fiscal » pour éviter toute confusion avec le rapport civil (V. sur cette question, F. Fruleux, JCl. Enregistrement Traité, V. Successions, fasc. 90).

Question n°3 : Ces développements appellent-ils, au fond, une appréciation homogène ?

Réponse : Non.

Ils sont contrastés. A certains égards, ils sont minimalistes, au point d’être simplistes. C’est le cas des indications relatives à l’exercice du choix du bénéficiaire pour la durée quinquennale ou décennale de conservation, qui, en réalité reportent sur les contribuables et praticiens les difficultés résultant de la rédaction dissonante des textes. Ils sont parfois bienveillants.  C’est le cas lorsque l’administration limite à la seule fraction supérieure à 300 000 € des biens ayant indûment bénéficié de l’exonération à 75 %, la déchéance du régime de faveur résultant du non-respect de l’obligation décennale de conservation, lorsque le bien a été conservé au moins 5 ans.

Question n°4 : Les praticiens sont-ils directement concernés par cette évolution des commentaires administratifs ?

Réponse : Oui.

Souvent très directement. C’est le cas lorsqu’en l’absence de tout fondement législatif et réglementaire, mais dans une logique conforme au nouveau dispositif, ils imposent d’inclure dans les actes de donation et déclarations de succession de nouvelles obligations déclaratives, pour l’application du « rappel spécial » engendré par ces régimes d’exonération lorsque les donataires ou successeurs ont déjà bénéficié des régimes de faveur lors de transmissions antérieures.

Question n°5 : L’administration fournit-elle des indications relatives au point de départ du nouveau délai décennal de conservation mis en place par la loi de finances pour 2023.

Réponse : Oui.

L’administration fiscale confirme, sans surprise, que comme son homologue quinquennal, il est constitué par la donation ou le décès. Le BOFiP rappelle également qu’en présence de transmissions successives,  les délais de 5 ou 10 ans s’appliquent distinctement pour chaque mutation ayant successivement bénéficié du régime de faveur(BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20, 11 juill. 2023, n°355).

Question n°6 : Les commentaires sont-ils ambigus en ce qui concerne le caractère optionnel du nouveau dispositif créé par la loi de finances permettant de rehausser à 500 000 € la limite de l’exonération à 75 % ?

Réponse : Non.

Le BOFiP confirme que comme nous le pensions (V. F. Fruleux, Renforcement des exonérations en faveur de certains biens ruraux : constat et recommandations : JCP N 2023, n° 3, étude 1013, n° 19), le nouveau dispositif permettant au successeur ou donataire de bénéficier d’une limite d’exonération à 75 % portée à 500 000 € en contrepartie d’une durée supplémentaire de conservation des biens transmis de 5 ans est optionnel. Ainsi, si le donataire ou successeur reçoit un actif exonéré dont la valeur excède 300 000 €, la durée de conservation du bien n’est pas nécessairement portée à 10 ans. Le bénéficiaire dispose d’une option. Il peut soit bénéficier d’une exonération de 75 % limitée à 300 000 € moyennant une durée de conservation de 5 ans, soit profiter d’une exonération à 75 % jusque 500 000 € en contrepartie d’une durée de conservation de 10 ans (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20, 11 juill. 2023, n° 215).

Question n°7 : Les précisions fournies par l’administration fiscale concernant ce choix sont-ils suffisamment précis ?

Réponse : Non.

L’administration fiscale se contente d’indiquer à cet égard que : « le bénéficiaire formalise dans l’acte de donation ou la déclaration de succession qu’il souhaite bénéficier du régime prévu au 3ème alinéa de l’article 793 bis du CGI. Cette formalisation est nécessaire pour liquider les droits de mutation à titre gratuit en conséquence. À défaut d’une telle formalisation, la liquidation sera effectuée selon le régime prévu au 2ème alinéa de l’article 793 bis du CGI » (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20, 11 juill. 2023, n° 215).

Autrement dit, faute de choix exprimé par le bénéficiaire de la transmission, dans l’acte de donation ou la déclaration de succession, la limite de 300 000 € sera appliquée au calcul des droits.

Ces indications sont beaucoup trop sommaires, tout comme l’est l’exemple fourni, dont la simplicité frise la caricature : un seul bien étant transmis à un unique bénéficiaire.

On sait pourtant d’ores et déjà que la mise en œuvre pratique de ce choix posera problème dans de nombreuses situations dans lesquelles les bénéficiaires de la transmission seront, pour diverses raisons, dans des situations différentes : certains étant concernés par l’option, d’autres ne pouvant en bénéficier (V. sur la variété de ces situations, F. Fruleux, Renforcement des exonérations en faveur de certains biens ruraux : constat et recommandations : JCP N 2023, n° 3, étude 1013, spéc. n° 23 et s). La rédaction du texte lui-même dans sa rédaction modifiée par la loi de finances pour 2023 est très maladroite et dissonante. En effet, la durée quinquennale ou décennale de conservation concerne « le bien », alors que la limite de 300 000 ou de 500 000 € s’apprécie par référence à « la part » reçue par chaque bénéficiaire.

Le BOFiP n’évoque pas ces situations. Il oublie même qu’une transmission successorale d’un bien unique puisse faire l’objet de déclarations de succession distinctes.

En réalité, il laisse aux intéressés et en pratique aux rédacteurs le soin de dénouer ces difficultés et contradictions sous leur responsabilité, aux termes des indications qu’ils mentionneront dans les actes ou déclarations.

Question n°8 : Les indications concernant la situation dans laquelle les bénéficiaires n’auraient formalisé aucun choix dans l’acte ou la déclaration sont-elles plus satisfaisantes ?

Réponse : Malheureusement non.

Le BOFiP indique à cet égard que : « le bénéficiaire pourra revendiquer, a posteriori, dans le délai de réclamation, la faculté de bénéficier du régime prévu au 3ème alinéa de l’article 793 bis du Code général des impôts (1) lorsque la liquidation a été effectuée selon le régime résultant de l’application du 2ème alinéa (2) lors de l’enregistrement de l’acte ou de la déclaration de succession » (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20, 11 juill. 2023, n°215). Mais il omet de préciser quelles sont les situations visées par cette régularisation a posteriori ?

On comprend implicitement qu’il s’agit des situations dans lesquelles les bénéficiaires n’auraient exprimé aucun choix lors de la transmission, ce qui aura conduit l’administration fiscale, en application de sa doctrine précitée, à appliquer la limite de 300 000 €. Dans un tel contexte, l’indication fournie par la doctrine administrative n’apporte rien. Elle correspond en effet à la solution dégagée par la jurisprudence du Conseil d’État (V. par exemple, CE, 20 déc. 2017, n° 414974 : JurisData n° 2017-028390 ; Dr. fisc. 2018, n° 12, comm. 229, note M. Seraille) .

La solution serait plus originale s’il s’agissait de revenir a posteriori, par voie de réclamation, sur le choix ayant été expressément formulé lors de la transmission d’opter pour une durée de conservation de 5 ans en contrepartie d’une exonération de 75 % limitée à 300 000 €. Un tel revirement pourrait, par exemple, s’expliquer par un projet de cession à terme du bien considéré n’ayant pas finalement abouti. Une telle possibilité trancherait avec la rigueur de la jurisprudence judiciaire rendue à l’égard d’autres régimes de faveur (V. notamment, s’agissant de l’exonération Dutreil, Cass. com., 16 avr. 2013, n° 12-17.432).

Question n°9 : Les commentaires relatifs à l’exercice du choix en présence d’une transmission portant à la fois sur des biens détenus en direct et des parts de GFA sont-ils plus clairs ?

Réponse : Oui. Ils ne sont toutefois pas exempts d’équivoque.

Le BOFiP confirme comme le faisait sa version antérieure que les limites de 300 000 € ou 500 000 € au-dessus desquelles l’exonération est ramenée à 50 % ne sont pas globales. Elles ne s’apprécient pas à la base, au niveau de la valeur des biens transmis, mais en aval sur la part reçue par chaque successeur ou donataire.

Lorsque la transmission porte à la fois sur des immeubles ruraux loués par bail à long terme et sur des parts de GFA, les limites s’apprécient distinctement pour chaque catégorie de biens (et en tenant compte des donations antérieures de biens de même nature reçus par le bénéficiaire depuis moins de 15 ans ayant déjà bénéficié de l’exonération). L’administration confirme à juste titre qu’en conséquence, pour l’application du nouveau dispositif, un seuil différent de 300 000 et 500 000 € est susceptible de s’appliquer à chaque catégorie de biens (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-30, 11 juill. 2023, n° 230).

Autrement dit, au titre d’une même transmission, un même bénéficiaire peut, par exemple, opter pour la limite de 300 000 € pour les biens ruraux qu’il reçoit et pour celle de 500 000 € pour les parts de GFA qui lui sont dévolues.

La formulation « un seuil différent est susceptible de s’appliquer à chaque catégorie de biens »  retenue par l’administration fiscale est cependant équivoque. Les variations qu’offrent les modalités d’appréciation de ces limites sont plus nombreuses. Il nous semble également acquis que des seuils différents sont également susceptibles de s’appliquer au sein de chaque catégorie de biens dévolus à des bénéficiaires distincts. Ainsi par exemple, au titre d’une même transmission portant sur des biens distincts, l’un des bénéficiaires peut opter pour la limite de 300 000 € et un autre pour celle de 500 000 €.

Question n°10 : Les commentaires administratifs fournissent-ils des précisions relatives à l’application au nouveau dispositif des règles restrictives concernant la déduction du passif ?

Réponse : Oui.

Pour neutraliser d’emblée des stratégies d’optimisation fiscale fondées sur l’endettement, l’article 769 du CGI énonce à l’égard de tout bien bénéficiant d’une exonération de droits de mutation par décès une règle particulière d’imputation du passif contracté pour son acquisition (CGI, art. 769). Les dettes contractées pour l’acquisition ou dans l’intérêt de tels biens s’imputent en priorité sur la valeur des biens considérés. Lorsque, comme c’est le cas pour les dispositifs qui nous intéressent, l’exonération n’est que partielle, l’impossibilité de déduire le passif résultant de ce texte ne s’applique qu’à concurrence de la fraction exonérée du bien considéré. Le BOFiP précise logiquement que l’option exercée par le bénéficiaire de la transmission pour la limite de l’exonération de 75 % rehaussée à 500 000 € accroîtra corrélativement la fraction non déductible du passif contracté pour son acquisition ou dans son intérêt (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20, 11 juill. 2023, n° 260).

Question n°11 : Des indications sont-elles fournies concernant les transmissions ayant successivement bénéficié des régimes d’exonération partielle ?

Réponse : Oui.

Les seuils de 300 000 et 500 000 € s’apprécient en tenant compte des donations antérieures ayant déjà bénéficié de l’exonération, à l’exception de celles passées depuis plus de 15 ans (CGI, art. 793 bis al. 4). Un rappel fiscal propre à ces régimes de faveur s’applique donc pour apprécier ces limites. Il s’ajoute à celui de droit commun régi par l’article 784 du CGI (CGI, ann. III, art. 281 A, CGI, ann. III, art. 281 B et CGI, ann. III, art. 281 C).

Le BOFiP fournit deux confirmations cohérentes concernant sa mise en œuvre. En premier lieu,  la prise en compte des donations antérieures de moins de 15 ans s’applique distinctement pour chacun des deux régimes d’exonération applicables respectivement aux biens détenus en direct et aux parts de GFA. En second lieu, seuls les biens ayant effectivement bénéficié du régime de faveur sont concernés.

Question n°12 : Les indications relatives aux obligations déclaratives imposées aux donataires et successeurs sont-elles plus novatrices ?

Réponse : Oui.

Une nouvelle obligation déclarative spécifique à l’application de ces régimes de faveur est créée ex nihilo par l’administration. Selon elle, les bénéficiaires sont tenus, aux termes de la déclaration de succession ou de l’acte de donation, d’individualiser les donations ayant bénéficié de l’exonération partielle. Ils doivent en outre indiquer, pour chacune, la durée de conservation choisie (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20, 11 juill. 2023, n°230 – BOI-ENR-DMTG-10-20-30-30, 11 juill. 2023, n° 270).

On peut légitimement s’interroger sur le fondement juridique de ce renforcement des obligations déclaratives. Les textes qui les régissent (CGI, ann. III, art. 281 A, 281 B et 281 C) sont antérieurs à la loi de finances pour 2023 ayant instauré cette durée alternative. Ils n’imposent donc pas cette obligation. Ils n’ont pas été modifiés suite à la réforme. Pour autant, ce renforcement est cohérent. Nous avions détaillé les raisons pour lesquelles la collecte de ces informations est nécessaire au praticien pour conseiller son client et parvenir à une liquidation exacte (V. F. Fruleux, Renforcement des exonérations en faveur de certains biens ruraux : constat et recommandations : JCP N 2023, n° 3, étude 1013,  n° 38 et s).

Les formules et déclarations fiscales des actes de donation et déclarations de succession doivent donc être adaptées en conséquence.

Question n°13 : Les indications relatives à la déchéance du régime de faveur résultant du non-respect de l’obligation de conservation sont-elles, elles aussi innovantes ?

Réponse : Oui.

L’administration fiscale retient une analyse bienveillante quand elle fixe les conséquences d’une déchéance de l’exonération résultant du non-respect de l’obligation décennale de conservation, lorsque le bénéficiaire a conservé le bien pendant 5 ans au moins. Le BOFiP précise en effet que dans un tel contexte, l’exonération partielle de 75 % jusqu’à 300 000 € n’est pas remise en cause puisque la condition de conservation du bien pendant cinq ans a été respectée. La déchéance porte ainsi uniquement sur la fraction de la valeur du bien supérieure à 300 000 € ayant bénéficié de l’exonération partielle de 75 % au lieu de celle de 50 % (BOI-ENR-DMTG-10-20-30-20, 11 juill. 2023, n° 355 et 360. – BOI-ENR-DMTG-10-20-30-30, 11 juill. 2023, n° 410 et s).   Autrement dit, si le bénéficiaire qui a opté pour une durée de conservation de 10 ans ne respecte pas cette condition, mais a conservé le bien pendant 5 ans au moins, le complément de droits se limitera à la partie de la valeur des biens transmis dépassant 300 000 € ayant indûment bénéficié de l’exonération de 75 %. L’exonération ne sera pas remise en cause. Seul le complément d’exonération à 75 % dépassant la limite de 300 000 € sera repris.

Cette lecture bienveillante peut s’appuyer sur des indications fournies par les minces travaux parlementaires  ainsi que sur la rédaction retenue par le 3e alinéa de l’article 793 bis.

Elle revient au final à considérer que les délais de 5 et 10 ans énoncés par l’article 793 bis n’ont pas la même nature. Le premier est requis pour le bénéfice même du régime de faveur. Le second concerne uniquement l’avantage résultant du rehaussement de la limite de l’exonération à 75 %.

Le non-respect du délai de conservation de 5 ans emporte déchéance du régime de faveur. La violation du nouveau délai de 10 ans seulement reprise de l’avantage complémentaire provenant du relèvement de la limite de l’exonération à 75 %.

L’administration fiscale fournit l’exemple suivant illustrant ce principe :

Exemple :

1/ En N, M. X fait donation à M. Y du bien rural loué à long terme A d’une valeur de 190 000 €.

Cette transmission bénéficie d’une exonération de 75 %. Le bien A doit être conservé pendant 5 ans.

2/ En N + 2, M. X fait donation à M. Y du bien rural loué à long terme B d’une valeur de 250 000 €. Deux hypothèses sont alors envisageables :

• 1ère hypothèse : Si M. Y ne formalise aucun choix, la transmission bénéficiera d’une exonération de 75 % à hauteur de (300 000 – 190 000) = 110 000 €, et d’une exonération de 50 % à hauteur de (250 000 – 110 000) = 140 000 €, sous réserve d’une conservation du bien B pendant 5 ans ;

• 2nde hypothèse : Si M. Y formalise son intention de bénéficier du régime prévu au troisième alinéa de l’article 793 bis du CGI, comme le total des biens donnés depuis moins de 15 ans soit 190 000 + 250 000 = 440 000 € est inférieur à 500 000 €, l’exonération de 75 % portera sur la totalité du bien B soit 250 000 €, qui doit être conservé pendant 10 ans.

3/ Cette seconde hypothèse est choisie pour la suite de l’exemple.

En N + 8, M. Y décide de céder les biens A et B.

Le bien A a été conservé plus de 5 ans. Cette cession est sans incidence sur le régime fiscal appliqué lors de la donation en N.

Le bien B n’a pas été conservé 10 ans mais plus de 5 ans. Ainsi, l’exonération partielle sera remise en cause à hauteur de la fraction de la valeur des biens transmis qui excède 300 000 € et qui, jusqu’à 440 000 €, a bénéficié d’une exonération de 75 % alors qu’elle n’aurait dû bénéficier que d’une exonération à concurrence de 50 %. Soit (250 000 – 110 000) = 140 000 x (75 % – 50 %) = 35 000 €.

Question n°14 : Ces indications bienveillantes conduisent-elles à formuler une mise en garde particulière ?

Réponse : Oui.

Cet effet atténué résultant non-respect de l’obligation décennale de conservation incitera certainement les donataires ou successeurs concernés à choisir le nouveau dispositif et à retenir une durée décennale de conservation afin de profiter d’une taxation plus clémente.

On rappellera toutefois qu’outre le complément de droits, la reprise résultant du non-respect de l’obligation de conservation entraînerait également l’exigibilité de l’intérêt de retard au taux de droit commun énoncé à l’article 1727 du CGI (c’est à dire 0,20 % par mois) sans minoration. Cet intérêt qui pourra courir sur une longue période. L’administration fiscale n’énonce à cet égard aucune mesure de tempérament.

  • [1] C’est-à-dire une exonération de 75 % plafonnée à 500 000 €.
  • [2] C’est-à-dire une exonération de 75 % limitée à 300 000 €
Droit fiscal
François FRULEUX

François FRULEUX

Docteur en droit

Diplômé Supérieur du Notariat

Maître de conférences associé à l’Université Paris-Dauphine

Membre du Centre de Recherche Droit Dauphine (CR2D)

Directeur du Jurisclasseur Fiscal Enregistrement Traité

Membre du comité scientifique de la revue Actes pratiques et stratégie patrimoniale, du Jurisclasseur Ingénierie du patrimoine et du Lexis Pratique Fiscal

Consultant auprès du CRIDON Nord-Est

Enseignant à l’AUREP