Responsabilité du banquier

Actualité
du 26 Septembre 2022
Henri
LEYRAT
Docteur en droit privé – HDR
Diplômé Notaire

Le manquement du prêteur à son devoir d’information s’agissant d’une assurance emprunteur s’analyse en une perte de chance pour l’emprunteur ouvrant droit à réparation (Cass. 2ème civ., 15 sept. 2022, n° 21-13.670) : 

Le 16 novembre 2006, une banque a consenti à une femme deux prêts immobiliers. Afin de garantir le remboursement de ces prêts en cas de sinistre, l’emprunteuse a adhéré à une assurance de groupe et a déclaré dans le questionnaire de santé qu'elle suivait un traitement médical depuis 15 ans. Le 31 août 2015, elle a été placée en arrêt de travail en raison de l'évolution défavorable de sa maladie et a sollicité le bénéfice de la garantie incapacité de travail. Le 8 juin 2016, après avoir fait réaliser une expertise médicale, l'assureur l’a informée de son refus de prise en charge du sinistre, en raison d'une clause contractuelle excluant « les suites médicales ou conséquences d'antécédents de santé mentionnés sur le bulletin d'adhésion ». Le 12 juillet 2017, l’emprunteuse a assigné l’assureur en exécution de son obligation et la banque au paiement d'une somme équivalente pour manquement à son obligation d'information et de conseil.

 

actu 220926

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La Cour d’appel débouta l’emprunteuse qui se pourvut en cassation.

 

La Cour de cassation casse l’arrêt en ces termes :

 

« Vu l'article 1147, devenu 1217, du code civil et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

 

11. Il résulte de ce texte que la banque qui propose à son client auquel elle consent un prêt d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'elle a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenue de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur.

 

12. Le préjudice résultant de ce manquement s'analyse en la perte d'une chance de contracter une assurance adaptée à sa situation personnelle et toute perte de chance ouvre droit à réparation, sans que l'emprunteur ait à démontrer que, mieux informé et conseillé par la banque, il aurait souscrit de manière certaine une assurance garantissant le risque réalisé.

 

13. Pour débouter Mme [P] [l’emprunteur] de ses prétentions contre la banque, l'arrêt, après avoir retenu la faute de la banque, énonce que le préjudice pouvant résulter de cette faute est une perte de chance dont la preuve incombe à celui qui s'en prévaut […].

 

14. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a exigé de l'emprunteuse la preuve d'une perte de chance raisonnable, a violé le texte et le principe susvisés ».

 

Avis de l’AUREP : logique, cette solution implique du prêteur qu’il contrôle avec sérieux l’adéquation de l’assurance emprunteur souscrite par l’emprunteur à ses besoins véritables.

Droit civil
Henri
LEYRAT
Docteur en droit privé – HDR
Diplômé Notaire