Question épineuse, celle des travaux d’amélioration réalisés par l’usufruitier occupe une nouvelle fois le devant de la scène.
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L’affaire commentée aujourd’hui s’articulait autour du règlement conflictuel d’une succession. Des époux avaient de leur vivant consenti à leurs trois enfants une donation-partage portant sur la nue-propriété de leur patrimoine. Un usufruit successif avait été réservé au conjoint survivant. Différents lots avaient été établis au profit des enfants parmi lesquels figuraient des parcelles de bois, des vignes et, des propriétés immobilières.
A la succession du dernier des époux donateurs, différents conflits sont intervenus entre les héritiers. Les faits révèlent notamment des mésententes sur la valorisation des biens donnés et partagés sur lesquels nous ne reviendrons pas. Toutefois, l’affaire, portée jusque devant la Cour de cassation remet à l’ordre du jour la question des dépenses d’amélioration financés par l’usufruitier.
En l’espèce, l’usufruitière veuve et titulaire de l’usufruit de l’entièreté du patrimoine avait de son vivant, financé d’importants travaux sur les différents biens démembrés. En conséquence, les parties se querellaient sur le caractère rapportable des sommes à la succession de leur mère au motif qu’elles constituaient des libéralités.
Si selon les juges du fond (CA Dijon, 30 juin 2022, n°21/00527), l’intention libérale faisait, semble-t-il, défaut dans bon nombre des dépenses financées, il en va différemment pour celles engagées sur une propriété rurale, qu’il convient à présent d’étudier.
Un des enfants avait reçu dans son lot, cette propriété rurale composée de bois, d’une forêt, de vignes et d’une maison d’habitation. Les faits révèlent que le donataire avait séjourné dans la propriété sans pour autant que la propriété constitue sa résidence régulière. En outre, la propriété rurale avait été utilisée un temps au titre d’un bail de chasse.
Les débats portèrent sur des dépenses opérées par l’usufruitière sur la maison d’habitation, qui, toujours selon les faits, valorisée à 15.000 euros au jour de la donation, était vétuste et inhabitable. Les travaux engagés, d’un montant de 922.843 euros, visaient à rendre habitable cet ancien logement de garde resté longtemps désaffecté.
Selon les juges du fond, le récapitulatif des travaux faisait apparaitre :
- 262.345 euros de travaux correspondant par nature à des gros travaux (portail, murs, toiture, pignon, aménagement intérieur de l’extension) à la charge légale du nu-propriétaire
- 660.498 euros de travaux d’aménagements (électricité, plomberie, restauration de façade, éclairage, ravalement, rénovation d’appartements) relevant pour leur part de la charge de l’usufruitier.
Toutefois, rappelons-le, l’ensemble des travaux avaient été pris en charge par la de cujus usufruitière.
Les juges du fond avaient alors, reconnu dans le financement de ces travaux « non nécessités par une contrainte de bail », sur « lesquels ne portait aucune obligation légale de rénovation », un appauvrissement de l’usufruitière, dans une intention libérale au profit du nu-propriétaire. Dès lors, ils estimaient que la somme devait être rapportée à la succession de la première.