L'habilitation familiale ne pouvant porter que sur les actes que le tuteur peut accomplir, seul ou avec une autorisation, il en résulte qu'elle ne peut porter sur les actes que le tuteur ne peut accomplir, même avec une autorisation, lesquels sont énoncés à l'article 509 du code civil (Cass. 1ère civ., 20 oct. 2022, avis, n° 22-70.011).
En l’espèce, le juge des contentieux et de la protection d’un tribunal judiciaire sollicita un avis de la Cour de cassation sur la question suivante :
Peut-il autoriser, dans le cadre d’une habilitation familiale, la personne habilitée à renoncer au nom de la personne protégée au bénéfice d’un contrat d’assurance-vie souscrit par son époux décédé ?

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Selon l’article 494-6 du Code civil, alinéa 1 à 6, applicable à l’habilitation familiale :
« L'habilitation peut porter sur :
– un ou plusieurs des actes que le tuteur a le pouvoir d'accomplir, seul ou avec une autorisation, sur les biens de l'intéressé ;
– un ou plusieurs actes relatifs à la personne à protéger. Dans ce cas, l'habilitation s'exerce dans le respect des dispositions des articles 457-1 à 459-2 du code civil.
La personne habilitée ne peut accomplir en représentation un acte de disposition à titre gratuit qu'avec l'autorisation du juge des tutelles.
Si l'intérêt de la personne à protéger l'implique, le juge peut délivrer une habilitation générale portant sur l'ensemble des actes ou l'une des deux catégories d'actes mentionnés aux deuxième et troisième alinéas.
La personne habilitée dans le cadre d'une habilitation générale ne peut accomplir un acte pour lequel elle serait en opposition d'intérêts avec la personne protégée. Toutefois, à titre exceptionnel et lorsque l'intérêt de celle-ci l'impose, le juge peut autoriser la personne habilitée à accomplir cet acte ».
Selon l’article 509 du Code civil, applicable à la tutelle :
« Le tuteur ne peut, même avec une autorisation :
1° Accomplir des actes qui emportent une aliénation gratuite des biens ou des droits de la personne protégée sauf ce qui est dit à propos des donations, tels que la remise de dette, la renonciation gratuite à un droit acquis, la renonciation anticipée à l'action en réduction visée aux articles 929 à 930-5, la mainlevée d'hypothèque ou de sûreté sans paiement ou la constitution gratuite d'une servitude ou d'une sûreté pour garantir la dette d'un tiers ;
2° Acquérir d'un tiers un droit ou une créance que ce dernier détient contre la personne protégée ;
3° Exercer le commerce ou une profession libérale au nom de la personne protégée ;
4° Acheter les biens de la personne protégée ainsi que les prendre à bail ou à ferme, sous réserve des dispositions de l'article 508 ;
5° Transférer dans un patrimoine fiduciaire les biens ou droits d'un majeur protégé ».
La Cour de cassation considère en conséquence que :
« 7. L'habilitation ne pouvant porter que sur les actes que le tuteur peut accomplir, seul ou avec une autorisation, il en résulte qu'elle ne peut porter sur les actes que le tuteur ne peut accomplir, même avec une autorisation, lesquels sont énoncés à l'article 509 du code civil.
8. La nécessité, pour la personne habilitée, d'obtenir l'autorisation du juge pour accomplir en représentation un acte de disposition à titre gratuit ou, à titre exceptionnel et lorsque l'intérêt de la personne protégée l'impose, un acte pour lequel elle serait en opposition d'intérêts avec celle-ci ne lui confère pas le pouvoir d'agir en dehors des limites ainsi fixées.
9. En conséquence, l'article 494-6 du code civil ne confère pas au juge le pouvoir de délivrer une habilitation familiale en représentation pour les actes visés à l'article 509 du code civil et, a fortiori, celui d'autoriser la personne habilitée en représentation à accomplir ces actes ».
Avis de l’AUREP : la question posée à la Cour de cassation présente un intérêt évident. Pour autant, le Haute juridiction fait le choix de ne pas ouvrir l’habilitation familiale aux actes interdits sous le régime de la tutelle, même lorsque le tuteur est autorisé par le juge. Dès lors, la personne habilitée ne peut être autorisée par le juge à renoncer au bénéfice d’un contrat d’assurance-vie pour le compte du majeur protégé.