Les biens reçus de son ascendant par le défunt en règlement d’une créance de salaire différé échappent au droit de retour légal des collatéraux privilégiés (Cass. 1ère civ., 1er décembre 2021, n° 20-12.315) :
Par un acte du 8 novembre 1986, il avait été procédé au partage de la succession d'une mère de famille, décédée le 10 février 1986, entre ses trois enfants. L’une des filles avait reçu des biens immobiliers, dont une partie en règlement d’une créance de salaire différé.
Elle décéda le 27 septembre 2011, en laissant pour lui succéder son mari.
Sur le fondement du droit de retour légal des frères et sœurs, les deux sœurs revendiquèrent la moitié indivise en pleine propriété de tous les biens immobiliers, en compris les parcelles attribuées au titre du règlement de la créance de salaire différé.

La Cour d’appel leur donna raison.
Sur pourvoi du mari de la fille décédée, la Cour de cassation casse l’arrêt au visa de l’article 757-3 du Code civil et de l’article L. 321-17, alinéa 1er, du Code rural et de la pêche maritime.
Pour la Haute juridiction :
« 9. Aux termes du premier de ces textes, par dérogation à l’article 757-2, en cas de prédécès des père et mère, les biens que le défunt avait reçus de ses ascendants par succession ou donation et qui se retrouvent en nature dans la succession sont, en l’absence de descendants, dévolus pour moitié aux frères et sœurs du défunt ou à leurs descendants, eux-mêmes descendants du ou des parents prédécédés à l’origine de la transmission.
10. Aux termes du second, le bénéficiaire d’un contrat de salaire différé exerce son droit de créance après le décès de l’exploitant et au cours du règlement de la succession ; cependant l’exploitant peut, de son vivant, remplir le bénéficiaire de ses droits de créance, notamment lors de la donation-partage à laquelle il procéderait.
11. Il en résulte que les biens reçus de son ascendant par le défunt en règlement d’une créance de salaire différé échappent au droit de retour légal des collatéraux privilégiés ».
Avis de l’AUREP : cette solution est logique dans la mesure où le droit de retour légal des collatéraux privilégiés ne peut porter que sur des biens à caractère familial reçu par succession ou par donation, ce qui n’est évidemment pas le cas d’une créance de salaire différé.