La Cour de cassation précise les règles de détermination de l’existence d’une récompense et celles relatives à la composition de la masse passive de la communauté (Cass. 1ère civ., 13 oct. 2021, n° 19-24.008) :
Dans cette affaire deux époux divorcèrent et un contentieux naquit quant à la liquidation de la communauté réduite aux acquêts existant entre eux.
L’époux était propriétaire d’une exploitation agricole lui appartenant à titre de bien propre.
La communauté avait financé du matériel agricole pour les besoins de l’exploitation Par ailleurs, des prêts avaient également été souscrits pour le remplacement de matériel.

S’agissant de l’acquisition du matériel agricole :
La Cour d’appel avait retenu l’existence d’une récompense due par l’époux à la communauté au titre du financement de l’acquisition du matériel.
La Cour de cassation casse l’arrêt sur ce point au visa des articles 1401, 1403 et 1437 du Code civil.
Selon la Haute juridiction, « Il ressort de ces textes que la communauté, à laquelle sont affectés les fruits et revenus des biens propres, doit supporter les dettes qui sont la charge de la jouissance de ces biens et que leur paiement ne donne pas droit à récompense au profit de la communauté lorsqu'il a été fait avec des fonds communs. Il s'ensuit que n'ouvre pas droit à récompense au profit de la communauté le paiement, au moyen des revenus bruts d'une exploitation agricole propre à un époux, des dépenses résultant de la gestion courante de celle-ci, tels le remplacement d'un matériel amorti ou l'entretien des biens mobiliers ou immobiliers affectés à l'exploitation ».
La Cour de cassation ajoute que « en reconnaissant à la communauté un droit à récompense pour l'ensemble du matériel acquis en cours d'union, alors qu'il ressortait de ses constatations que cette acquisition se rattachait partiellement à la gestion courante de l'exploitation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».
S’agissant des prêts nécessaires à l’acquisition du matériel agricole :
La Cour d’appel avait retenu que les prêts souscrits par les époux pour l’acquisition du matériel devaient être inscrits au passif de la communauté.
La Cour de cassation casse l’arrêt sur ce point au visa des articles 1485, 1404, alinéa 2, et 1406 du Code civil.
Selon la Haute juridiction, « Il résulte du premier de ces textes qu'à partir de la dissolution de la communauté, dans les rapports entre époux, chacun de ceux-ci supporte seul les dettes qui n'étaient devenues communes que sauf récompense à sa charge. Aux termes du deuxième, forment des propres par leur nature, mais sauf récompense s'il y a lieu, les instruments de travail nécessaires à la profession de l'un des époux, à moins qu'ils ne soient l'accessoire d'un fonds de commerce ou d'une exploitation faisant partie de la communauté. Selon le troisième, forment aussi des propres, sauf récompense s'il y a lieu, les biens acquis à titre d'accessoires d'un bien propre, ainsi que les valeurs nouvelles et autres accroissements se rattachant à des valeurs mobilières propres ».
La Cour de cassation considère ainsi que « seul le solde des emprunts afférents au remplacement d'un matériel amorti devait être supporté à titre définitif par la communauté à compter de sa dissolution, le solde relatif à l'acquisition du nouveau matériel devant être supporté par M. [Q] [l’époux] ».
Avis de l’AUREP : La Cour de cassation rend une décision de principe dans laquelle elle considère que les dépenses courantes, acquittées au moyen des revenus d’une entreprise individuelle propre, et nécessaires à la gestion de ladite entreprise, n’ouvrent pas droit à récompense pour la communauté.