Exonération de DMTG des frères et sœurs : résistance des juges du fonds

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paul campbell Pour Unsplash+

Nous commentions il y a quelques semaines un arrêt remarqué et publié au bulletin, de la chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. com., 28 mai 2025, n°21-16.632). Dans cette affaire, il était question, comme dans celle objet de la présente actualité, de déterminer si le frère ou la sœur pacsé et vivant sous le même toit que le défunt peut bénéficier de l’exonération de DMTG de l’article 796-0 ter du CGI (sous condition d’âge ou d’incapacité en outre). Autrement dit, le collatéral lié par un pacte civil de solidarité (PACS) peut-il être considéré comme célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps du point de vue de texte et ainsi bénéficier de l’exonération ?

Dans cette première affaire, la Cour d’appel de Toulouse avait répondu positivement. Elle se fondait sur le principe selon lequel il n’y a pas à distinguer là où la loi ne distingue pas. En raison de l’absence de définition du célibat en droit fiscal, les juges du fond estimaient que « la situation de l’héritier à la date de l’ouverture de la succession y est appréhendée par référence au mariage, de sorte qu’une personne célibataire au sens de l’article 796-0 ter précité doit uniquement s’entendre de celle qui n’est pas mariée ».

Pour autant, cette lecture binaire n’emporta pas l’adhésion de la Haute juridiction saisie sur pourvoi de l’administration. En se fondant sur la définition du PACS (C. civ., art. 515-4), la Cour de cassation rejeta le bénéfice de l’exonération au frère du défunt pacsé au jour du décès. Le PACS impliquant une vie commune, il apparaît incompatible avec une exonération réservée aux contribuables vivant seuls.

Ainsi, le présent arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation venait confirmer qu’il s’agit de distinguer au sens de l’article, les personnes soumises à une obligation de vie commune, tels que les partenaires de PACS et les époux, des autres. Loin d’élargir la portée du texte, la Haute juridiction en confirmait donc la lecture stricte, fidèle à l’esprit d’origine du texte : l’exonération vise les frères et sœurs vivant véritablement seuls, en dehors de toute forme d’union, même non matrimoniale

Cela étant précisé, penchons à présent sur une récente affaire jugée une nouvelle fois par la Cour d’appel de Toulouse (CA Toulouse, 26 nov. 2025, n°23/03318).

Si la question soumise à l’examen de la cour d’appel était la même, son raisonnement fut également similaire malgré l’arrêt de la Cour de cassation rendu depuis. Précisément, elle soutient que le collatéral pacsé est en droit de bénéficier de ladite exonération. Pour fonder son raisonnement, les juges repartent de l’intention du législateur et s’appuient sur une interprétation littérale de l’article 796-0 ter précité.

S’agissant de l’intention du législateur en 2007, elle était, en synthèse, de tenir compte de la situation particulière des frères et sœurs vivant sous le même toit en leur accordant une exonération des droits de succession pour éviter des difficultés matérielles comparables à celles du conjoint survivant. En clair, l’exonération aspirait à éviter que les collatéraux visés ne soient contraints de céder la résidence principale pour payer les droits.

Ensuite, « […] la lettre du texte adopté n’est susceptible d’aucune interprétation en ce que la loi a posé comme seules conditions de son application l’âge de l’héritier, sa domiciliation personnelle depuis plus de cinq ans au domicile du défunt et la qualité de ‘célibataire, veuf, divorcé ou séparé’ alors que le PACS était une institution qui existait déjà et que l’article 760-0 ter du code général des impôts n’apporte aucune restriction sur l’existence d’un PACS ou même d’un concubinage, situations de droit ou de fait créatrices de droit qui ne modifient nullement le statut de célibataire au sujet duquel le droit fiscal ne donne d’ailleurs aucune définition contraire. »

Autrement dit, la loi n’exclut pas les partenaires liés par un PACS ou vivant en concubinage de l’exonération, puisque ces situations ne modifient pas leur statut légal de célibataire. L’article 796‑0 ter du CGI ne conditionne l’application qu’à l’âge, à la domiciliation et au statut de célibataire, veuf, divorcé ou séparé, sans imposer d’exclusion spécifique pour le PACS ou le concubinage.

Avis de l’AUREP : Nous déplorons l’absence d’homogénéité entre les juridictions concernant l’interprétation de l’article 796‑0 ter du CGI. La position de la Cour de cassation étant sans équivoque et publiée au bulletin, nous espérons qu’une clarification sera apportée si ce contentieux venait à être porté devant elle.

Droit fiscal
Communication AUREP

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