Le 121ème Congrès des notaires s’est déroulé à Montpellier les 25 et 26 septembre. Comme d’habitude ce fut un grand moment que nous avons partagé. Nous y avons croisé nombre d’anciens élèves diplômés de l’AUREP
Le thème du Congrès « Famille et créativité notariale », était subdivisé en trois parties : * La naissance de la famille, * La vie de la famille, * La famille brisée. Il a donné lieu à un rapport de près de 1000 pages particulièrement riche d’un savoir rigoureusement fondé. On est toujours impressionné par la pertinence des observations et suggestions.
Selon une tradition bien établie, les douze rapporteurs, excellents, ont soumis aux 3500 notaires présents diverses propositions destinées améliorer les pratiques notariales dans l’intérêt bien compris de leurs clients. Les propositions retenues seront proposées au législateur pour être intégrées au code civil (nombreuses sont le propositions des différents congrès qui ont été traduites en texte de loi).
Le démembrement qui bien souvent impacte la vie de la famille à fait l’objet de plusieurs propositions.
Les 2ème et 3ème commissions ont apporté sur ce sujet des éclairages pertinents.
Nous retiendrons certaines propositions de la 2ème commission que nous apprécions particulièrement et que nous aurions largement voté (seuls les notaires votent).
Elles concernent les droits financiers d’une société familiale revenant soit à l’usufruitier, soit au nu-propriétaire. Il est vrai que le code civil de 1804 n’avait apporté aucune réponse à des droits financiers, alors inexistants. Aujourd’hui la répartition de ces droits financiers sont encore « incertains », et les positions des uns et des autres discutables et discutées. Doctrine et jurisprudence expriment des avis qui ne font pas toujours consensus. L’AUREP a participé au débat.
Il serait plus rassurant que le législateur prenne position et formule des réponses adaptées écrites dans le code civil, voir le code de commerce.
La deuxième commission va y contribuer. Elle rappelle que les dividendes sont des « fruits », leur distribution revient à l’usufruitier et à lui seul. La convention contraire est impossible. Si leur distribution provient d’un prélèvement sur les sommes placées en report à nouveau, ce sont toujours des fruits revenant exclusivement à l’usufruitier.
Cependant, dans certaines circonstances ces dividendes, en raison de leur origine, distribution de résultats mis en réserve, ou provenant de l’arbitrage d’un actif significatif de la société (arbitrage d’un immeuble), doivent être qualifiés de produits.
A qui profite la distribution des sommes mises en réserves qui participent de l’augmentation de la substance de société ? Qui de l’usufruitier ou du nu-propriétaire a vocation à les percevoir ? La doctrine partagée, la jurisprudence hésitante.
Le 121ème Congrès des notaires propose, avec raison, prenant acte d’une décision estampillée (P+B+R) de la Cour de cassation chambre commerciale (Cass.Com. 27 mai 2015 n° 14.16246) que les sommes affectées en réserve faisant l’objet d’une décision ultérieure de distribution, reviennent à l’usufruitier sous forme d’un quasi-usufruit, assorti en conséquence de l’obligation de rendre. L’AUREP partageait depuis longtemps cette position. L’inscrire dans la loi mettrait fin à aux débats.
Dans le prolongement de ces dispositions le rapporteur propose aux congressistes que selon une démarche identique la distribution d’un dividende exceptionnel provenant de l’arbitrage d’un actif significatif soit également soumis au quasi-usufruit, c’est à dire assorti de l’obligation de rendre. La Cour de cassation, 3ème chambre civile, a pris nettement position dans une décision du 19 septembre 2024 ? Le rapporteur propose également d’étendre le quasi-usufruit au boni de liquation.
Constatons que le quasi-usufruit, ignoré pendant longtemps par la pratique notariale et toujours par le code civil, remplacé par la locution « obligation de rendre », fait flores. Nous pouvons que nous en féliciter. Le notariat est bien force de propositions.
Le rapporteur suggère de donner un contenu à l’article 1844-2 (abrogé et donc vide actuellement de toute disposition), en précisant que chacune de ces dispositions conduisant à une attribution à l’usufruitier avec obligation de restitution soient assorties de possibles conventions contraires, telles que le partage de son montant entre usufruitier et nu-propriétaire en proportion de la valeur respective de leur droit ou encore par report sur un bien subrogé, voir attribution intégrale au nu-propriétaire.
Constatant également que les droits politiques de la propriété démembrée des droits sociaux démembrement de propriété sont loin d’être clairement explicités le rapporteur invite également le législateur a apporter des réponses aux questions en suspens, par exemple qui de l’usufruitier ou du nu-propriétaire supporte les dettes ? Qui doit être destinataire des éléments d’information de la vie sociale ?
La 3ème commission a consacré une partie significative des ses travaux à : « La famille à l’épreuve de la propriété démembrée ». Du très beau et bon travail, qui n’a pas pour été suivie de propositions particulières.
Le 122ème Congrès se tiendra à Lille, il aura pour thème : « le notaire et l’impôt, clarifier conseiller, sécuriser ». Il est fort probable qu’il sera très suivi.