SAS & révocation du dirigeant : les statuts priment sur les conventions extra-statutaires

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Les statuts d’une SAS prévoyaient que le directeur général pouvait être révoqué par décision du président ad natum, autrement dit, à tout moment, sans qu’il soit nécessaire d’établir un juste motif.

Isidore Decamon Pour Unsplash+

Lors d’une assemblée générale du 2 octobre 2019, les associés de la société avaient, à l’unanimité, nommer M. X, directeur général et, adopté les conditions d’exercice de son mandat telles que figurant dans une annexe au procès-verbal. Il était notamment prévu, que le mandat de directeur général pouvait être révoqué dans trois hypothèses précisément définies.

Le 26 juin 2020, la société Y., agissant en tant que présidente de la SAS, a révoqué M. X de ses fonctions de directeur général. S’en suivit un contentieux, ce dernier revendiquant des dommages et intérêts au regard de l’absence de juste motif dans les motivations de sa révocation.

En clair, il était question de savoir s’il convenait d’appliquer la convention extra-statutaire votée à l’unanimité instaurant ce régime de révocation plus favorable que les règles statutaires.  C’est ce que retenu la Cour d’appel de Paris selon laquelle la décision prise à l’unanimité en assemblée générale démontrait la volonté expresse des associés de déroger aux statuts par une décision collective prise aux conditions requises pour modifier les statuts. Dès, les juges du fond avaient pu considérer que la décision collective s’imposait à la société, quand bien même les statuts n’auraient pas fait l’objet d’une modification, sans que soit méconnu le principe de primauté des statuts sur un acte extra-statutaire.


L’arrêt est cassé par la chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. com., 9 juill. 2025, n° 24-10.428) qui s’appuie sur une lecture stricte des articles L. 227-1 et L. 227-5 du Code de commerce. Conformément à sa position antérieure[1], elle rappelle que selon ces textes, les statuts d’une SAS fixent les conditions dans lesquelles celle-ci est dirigée, notamment les modalités de révocation de ses dirigeants. De surcroît, si « une décision des associés peut compléter les statuts sur ce point, elle ne peut y déroger, quand bien même aurait-elle été prise à l’unanimité. »


Avis de l’AUREP : L’arrêt confirme la primauté des statuts, en rappelant qu’ils constituent la norme exclusive pour encadrer les modalités de direction de la SAS. Si les associés disposent d’une certaine liberté pour compléter les statuts en la matière, ils ne peuvent en aucun cas y déroger par une décision extra-statutaire, fût-elle prise à l’unanimité.

La Cour de cassation verrouille ainsi toute tentative de contournement, au nom de la sécurité juridique et de la lisibilité du régime de gouvernance exprimée dans les statuts. La pratique devra donc rester vigilante : toute volonté de déroger aux stipulations statutaires en matière de révocation du dirigeant devra impérativement prendre la forme d’une modification des statuts.

[1] Cass. com., 12 oct. 2022, n°21-15.382

Droit des sociétés
Communication AUREP

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