Article publié dans le Magazine Gestion de Fortune n°365 Février 2025
Le changement de forme sociale avant de procéder à la cession de titres est une opération courante. Pour cause, le taux des droits d’enregistrement applicable varie selon la nature juridique des titres cédés.

Image par vargazs de Pixabay
Les cessions de droits sociaux sont soumises à un droit d’enregistrement dont le taux est fixé par l’article 726 du Code général des impôts. Rappelons dès à présent en synthèse, qu’à ce jour :
Pour les cessions d’actions, le taux s’élève à 0,10% ;
Pour les cessions de parts sociales, le taux est fixé à 3% après application, pour chaque part, d’un abattement égal au rapport entre 23 000 € et le nombre total de parts de la société.
Enfin, pour les cessions de titres de personnes morales à prépondérance immobilière, le taux des droits de mutation à titre onéreux est fixé à 5 %.
On l’aura compris, la transformation en société par actions sera souvent et dans une certaine mesure, motivée par cette différence de traitement fiscal.
Dans l’affaire qui nous intéresse aujourd’hui, nous avions à faire à une société historiquement constituée sous forme d’une SARL transformée, préalablement à sa cession, en SAS. Précisément, le 24 juillet 2012, les associés ont procédé, au cours d’une assemblée générale extraordinaire, à la transformation prenant effet à cette date. Le lendemain, soit le 25 juillet 2012, un contrat de cession des titres était conclu avec l’acquéreur. Le 3 août 2012, ce dernier déposa les déclarations de cession des droits sociaux auprès du service des impôts et régla les droits d’enregistrement au tarif dégressif prévu pour les actions à cette époque. Enfin, le 7 août 2012, le procès-verbal de l’assemblée générale extraordinaire a été enregistré par l’Administration.
L’Administration fiscale remit en cause le bénéfice du taux dégressif prévu pour les actions au motif, que les formalités de publicité du changement de forme sociale de SARL en SAS de la société cédée n’avaient pas été réalisées à la date de la cession. Dès lors, la cession portant selon elle sur des parts sociales, elle procédait à des rappels de droits d’enregistrement. Le cessionnaire contestant ce rappel, le litige naquit de cette divergence.
Les juges d’appel saisis de l’affaire avaient alors considéré que l’inscription sur le registre des mouvements de titres ne rendait pas la transformation opposable à l’Administration. De même, la déclaration de cession des droits sociaux du 3 août 2012 ne permettait pas à cette dernière de connaître la nouvelle forme de la société cédée. De surcroît, les actes sujets à mention au registre du commerce et des sociétés ne peuvent être opposés à l’Administration fiscale que s’ils ont été publiés. Dans le cas présent, ils jugèrent que le service des impôts n’avait eu connaissance de la forme nouvelle de la société qu’au moment de la publication du procès-verbal d’assemblée décidant sa transformation le 7 août 2012.
Saisie sur pourvoi du cessionnaire, il appartenait désormais à la Chambre commerciale de la Cour de cassation de statuer (Cass. com., 18 déc. 2024, n°23-21.435).
Spécifiquement la question à lever était la suivante : l’absence de publication au registre du commerce et des sociétés d’une transformation d’une SARL en SAS avant l’enregistrement de l’acte de cession des titres de cette société fait elle obstacle au bénéfice du tarif des droits d’enregistrement applicable à cette nouvelle forme juridique ?
La Haute juridiction se fonda sur un principe fondamental de droit fiscal pour casser l’arrêt d’appel : « les droits d’enregistrement applicables à une cession de droits sociaux sont liquidés selon la nature juridique de ces droits déterminée à la date du fait générateur des droits d’enregistrement, lequel correspond à la date du transfert de propriété ». Selon les juges, le fait qu’à la date de la soumission de l’acte de cession à la formalité de l’enregistrement, la transformation dont la société a fait l’objet antérieurement n’ait pas été publiée au registre du commerce et des sociétés est sans incidence.
Avis de l’AUREP : Il convient donc d’apprécier à la date du fait générateur des droits d’enregistrement, soit ici la date du transfert de propriété des titres, la nature juridique des titres pour déterminer le tarif applicable.
Article publié dans le Magazine Gestion de Fortune n°365 Février 2025
