Quel prix de cession retenir pour la parcelle vendue à l’héritier preneur à bail ?

Accueil + Publications & Agenda + Quel prix de cession retenir pour la parcelle vendue à l’héritier preneur à bail ?

M. [J] [U] est décédé le 12 novembre 2014, laissant pour héritiers ses deux enfants : sa fille Mme [R] [U] et son fils M. [Z] [U]. Il avait rédigé un testament olographe le 17 février 2012, par lequel il instituait son fils légataire de la pleine propriété de la quotité disponible.

Photo de Caroline Veronez sur Unsplash

Par deux actes notariés du 1er juin 2012, il avait :

  • Vendu à son fils et à son épouse un ensemble de terres agricoles, dont son fils était déjà preneur à bail,
  • Donné à son fils la nue-propriété de deux maisons.

À la suite de désaccords dans le règlement de la succession, la fille du défunt a assigné son frère en ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage.

Précisément, il était, entre autres, question de savoir si la cession des terres agricoles au fils, présomptif héritier, avait été consentie à un prix manifestement minoré, ce qui le cas échant pourrait constituer une donation indirecte. Autrement dit, avant même de caractériser l’élément intentionnel, souvent la source du contentieux, il était question ici de déterminer s’il y avait appauvrissement du père et enrichissement corrélatif du fils. 

En cela, les faits révèlent qu’un expert avait été désigné pour évaluer les parcelles de terres cédées. Par voie de conséquence, la comparaison de cette évaluation avec le prix de cession permettait de savoir s’il y a ou non minoration du prix et donc avantage indirect.

Ici, le fils preneur à bail et acquéreur des parcelles estimait qu’il convenait d’estimer les terres comme étant occupées, ce qui on l’aura compris conduisait à la pratique d’une décote sur le prix de cession et, vraisemblablement battait à revers l’existence d’une éventuelle minoration du prix. Il faisait grief à l’arrêt d’appel de rejeter sa requête et de déterminer le prix de cession à l’inverse libre de toute occupation. Pour cause, les juges du fond avaient estimé que du fait de l’acquisition, le bail dont bénéficiait le fils avait cessé de sorte que celui-ci était devenu propriétaire de terres libres.

Pourvoi en cassation de l’intéressé qui finalement aura eu gain de cause. Rappelant les critères permettant de qualifier une libéralité rapportable à la succession (C. civ, art. 843), la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel (Cass. 1ère Civ., 26 mars 2025, n°22-23.937).

Selon la Haute juridiction, l’existence de l’élément matériel, résultant ici de la minoration du prix de vente de terres agricoles à un héritier présomptif, « doit s’apprécier au regard de la valeur réelle des terres au jour de leur vente, considération prise de l’existence d’un bail, peu important que celui-ci ait été consenti à cet héritier. »

Reste à savoir ici si la prise en compte de l’existence du bail, dans la valorisation des parcelles cédées était inférieure au prix de cession effectivement payé par le fils, ce qui, le cas échéant, pourrait caractériser un avantage indirect.

Droit fiscal
Communication AUREP

Communication AUREP